L’abattage des animaux d’élevage en atelier agréé est incontournable à la production de viande, et ne peut être remplacé. Selon une étude IFOP réalisée en janvier 2021 (1), plus de 80 % des Français seraient favorables à ce que les animaux d’élevage soient désormais abattus sur leur lieu d’élevage par des professionnels qui se déplaceront sur les exploitations.
Afin de répondre à la demande sociétale, l’article 73 de la loi Agriculture et Alimentation (EGalim) a ouvert en 2018 la voie à une expérimentation de quatre ans des abattoirs mobiles en France.
En Normandie, des abattoirs fixes ont été fermés au cours des dernières années, laissant des éleveurs dépourvus de solution d’abattage de proximité. Devant parfois faire des centaines de kilomètres pour abattre leurs animaux, ils ont décidé de se lancer dès 2018 dans un projet d’abattoir mobile, appelé plus tard « l’Abatt’ mobile ».
Dans ce contexte, pendant le premier semestre 2022, Clémence Bitu, cheffe de projet au sein de l’Association LIT OUESTEREL, et Laura Lucas, étudiante vétérinaire, ont accompagné ce projet normand d’abattoir mobile « l’Abatt’Mobile » en tant qu’initiative pilote.
L’Abatt’mobile est un projet de camion d’abattage mobile en Normandie destiné aux porcins.
Le camion sera équipé pour effectuer l’abattage des animaux dans les meilleures conditions pour leur bien-être, celui des salariés qui y travailleront ainsi que dans le respect de toutes les normes sanitaires. Il pourra être utilisé aussi bien pour les éleveurs AB, que conventionnel. Le plein-air pourra également être pris en charge.
Ce projet a été lancé à l’initiative de l’Association Bio en Normandie pour répondre aux attentes d’éleveurs bio, soucieux des conditions d’abattage de leurs animaux. Un groupe de travail s’est ainsi formé et a débouché sur la création de l’Association L’Abatt’Mobile.
Après plusieurs mois et années de réflexion, de consultation, de planification sur le sujet, est née en juin 2020, L’Abatt’Mobile, une association de préfiguration. Avant le lancement de la structure qui gèrera l’unité d’abattage mobile, cette association permet de passer aux actions concrètes pour le camion d’abattage puisse voir le jour rapidement
Pour en savoir plus : Accueil – L’Abatt’Mobile (labattmobile.fr)
Cet accompagnement portait sur 2 axes principaux :
– Conduire un travail de recensement de la réglementation spécifique à l’abattage à la ferme ;
– Consolider les choix technico-organisationnels en vue de la mise en route de l’abattoir.
Deux ateliers de réflexion participative, organisés selon les principes des Living labs, ont rassemblé plus d’une vingtaine d’experts (en réglementation, vétérinaires, éleveurs, bouchers et découpe, frigoristes, éthologues).
Après cet accompagnement, l’association Abatt’Mobile dispose des éléments pour compléter son dossier de demande d’agrément. Un guide réglementaire à destination de tous les porteurs de projet d’abattage mobile a été rédigé et est disponible ci-dessous.
À ce jour, le projet d’abattage mobile est en sommeil. L’association Abatt’Mobile ayant fait son travail de préfiguration, elle cherche un porteur de projet pour lancer l’abattoir sur les routes. Le cahier des charges fonctionnel est de plus un élément de valeur que les porteurs de l’Abatt’Mobile sont prêts à partager avec d’autres porteurs de projet.
Au sortir de cette opération, qui nous a conduit à rencontrer plusieurs acteurs concernés par ce sujet, nous partageons avec vous les principaux enseignements que nous en avons retiré :
– Les porteurs de projet d’abattoir mobile sont souvent des éleveurs qui ne disposent pas de solutions d’abattage fixe à une distance de leur exploitation qu’ils jugent raisonnable. Ils s’inscrivent généralement dans une démarche éthique, avec la volonté d’accompagner les animaux élevés jusqu’au bout, dans les meilleures conditions. Il y a aussi une envie de se réapproprier l’outil de production et d’aller jusqu’à récupérer de la valeur.
– La complexité de la réglementation est une barrière d’entrée pour un projet d’abattoir mobile, en premier lieu car elle est dense, ce n’est pas du domaine d’expertise des porteurs de projet. Cela mobilise beaucoup de temps, et potentiellement des coûts si on s’adjoint l’aide d’un expert pour accompagner son projet.
– Un abattoir mobile est un projet multi partenarial. Il s’insère dans un écosystème à l’échelle locale (éleveurs, élus, transporteurs, bouchers, vétérinaires, etc.) alors que l’abattoir fixe industriel s’insère plutôt dans une chaîne de valeur. Tout cela prend du temps de mise et maintien en relations. Des ressources doivent être dédiées à cette mise en relation qui ne doit pas être négligée.
– Aujourd’hui, il n’y a pas d’abattoir mobile ayant fait la preuve qu’un modèle économique fonctionne.
– Pour l’instant, des enquêtes menées auprès de consommateurs ont montré qu’il n’y avait majoritairement pas de valeur ajoutée perçue pour l’abattage mobile. Il n’y a pas encore de résonance « marketing ». Dans notre sondage Opinion Way, parmi une liste de critères prioritaires pour améliorer le bien-être animal, l’abattage à la ferme arrive en dernier par exemple. Nous pensons que ce ne sera pas facile de se démarquer sur les conditions de mise à mort en dehors des circuits de vente directe, où le client est en contact avec l’éleveur.
Dans les Pays de la Loire, le LIT OUESTEREL travaille avec son membre AALVIE, engagé sur un sujet similaire.
01/03/2023